Et là, suivant la coutume qui s’attache aux fils de roi, l’enfant royal est nourri par la mère et par la nourrice. Mais à la nourriture on ne laisse qu’un sein. L’autre est sectionné et la poitrine est plate comme celle d’un homme (sauf le nœud de la cicatrice).
La voyageuse, voyant cela, s’étonne.
Alors le vice-roi : « Vous avez bien remarqué comme tout le monde, n’est-ce pas, que quand l’enfant tette, l’autre mamelle, il la touche constamment et la caresse. C’est ainsi que ça va le mieux.
« Or la nourrice nous en coupons une pour que l’enfant apprenne plus vite à parler. En effet, ce sein absent l’intrigue tellement qu’il n’a de cesse qu’il n’ait pu composer un mot et interroger là-dessus son entourage.
« Et le premier mot qui vient, c’est toujours : abricot. »
Textes poétiques
Henri Michaux