Par la douce pitié qui s’ attendrit au pli,
Pourtant dur, de ta lèvre, inaccessible amante,
Saurais-tu donc effacer la marque infamante
Que la vie imprima sur mon front assoupli !
Sois, au moins, la main qui berce, et lorsque a faibli
Mon orgueil, et ce pendant que geint la tourmente,
Abrite-moi comme d’ une magique mante,
Des ténèbres de ta chevelure d’ oubli ;
Pourtant dur, de ta lèvre, inaccessible amante,
Saurais-tu donc effacer la marque infamante
Que la vie imprima sur mon front assoupli !
Sois, au moins, la main qui berce, et lorsque a faibli
Mon orgueil, et ce pendant que geint la tourmente,
Abrite-moi comme d’ une magique mante,
Des ténèbres de ta chevelure d’ oubli ;
Et que de tes yeux la translucide prunelle
Me verse la fraîcheur et la paix solennelle
De la mare endormie en un lit de roseaux.
Mais surtout garde-toi bien close, et taciturne,
Tel que sous le soleil un augural oiseau.
Car mon âme frémit de regarder dans l’ urne.
Les cantilènes Livre I
Jean Moréas