J’ai pris de toi tout le souci tout le tourment
Que l’on peut prendre à travers tout à travers rien
Aurais-je pu ne pas t’aimer
O toi que la gentillesse
Comme une pêche après une autre pêche
Aussi fondantes que l’été
Que l’on peut prendre à travers tout à travers rien
Aurais-je pu ne pas t’aimer
O toi que la gentillesse
Comme une pêche après une autre pêche
Aussi fondantes que l’été
Tout le souci tout le tourment
De vivre encore et d’être absent
D’écrire ce poème
Au lien du poème vivant
Que je n’écrirai pas
Puisque tu n’es pas là
Les plus ténus dessins du feu
Préparent l’incendie ultime
Les moindres miettes de pain
Suffisent aux mourants
J’ai connu la vertu vivante
J’ai connu le bien incarné
Je refuse ta mort mais j’accepte la mienne
Ton ombre qui s’étend sur moi
Je voudrais en faire un jardin
L’arc débandé nous sommes de la même nuit
Et je veux continuer ton immobilité
Et le discours inexistant
Qui commence avec toi qui finira en moi
Avec moi volontaire obstiné révolté
Amoureux comme toi des charmes de la terre.
Derniers poèmes d’amour
Paul Éluard