Les Fourberies de Scapin ACTE II Scène 2
Les Fourberies de Scapin par Molière
Léandre, Géronte.
Géronte, seul.
Que pourrait-ce être que cette affaire-ci ? Pis encore que le sien ? Pour moi, je ne vois pas ce que l’on peut faire de pis; et je trouve que se marier sans le consentement de son père est une action qui passe tout ce qu’on peut s’imaginer. Ah ! vous voilà.
Léandre, en courant à lui pour l’embrasser.
Ah ! mon père, que j’ai de joie de vous voir de retour !
Géronte, refusant de l’embrasser.
Doucement. Parlons un peu d’affaire.
Léandre
Souffrez que je vous embrasse, et que…
Géronte, le repoussant encore.
Doucement, vous dis-je.
Léandre
Quoi ? vous me refusez, mon père, de vous exprimer mon transport par mes embrassements !
Géronte
Oui, nous avons quelque chose à démêler ensemble.
Léandre
Et quoi ?
Géronte
Tenez-vous, que je vous voie en face.
Léandre
Comment ?
Géronte
Regardez-moi entre deux yeux.
Léandre
Hé bien ?
Géronte
Qu’est-ce donc qui s’est passé ici ?
Léandre
Ce qui s’est passé ?
Géronte
Oui. Qu’avez-vous fait pendant mon absence ?
Léandre
Que voulez-vous, mon père, que j’aie fait ?
Géronte
Ce n’est pas moi qui veux que vous ayez fait, mais qui demande ce que c’est que vous avez fait.
Léandre
Moi, je n’ai fait aucune chose dont vous ayez lieu de vous plaindre.
Géronte
Aucune chose ?
Léandre
Non.
Géronte
Vous êtes bien résolu.
Léandre
C’est que je suis sûr de mon innocence.
Géronte
Scapin pourtant a dit de vos nouvelles.
Léandre
Scapin !
Géronte
Ah ! ah ! ce mot vous fait rougir.
Léandre
Il vous a dit quelque chose de moi ?
Géronte
Ce lieu n’est pas tout à fait propre à vider cette affaire, et nous allons l’examiner ailleurs. Qu’on se rende au logis. J’y vais revenir tout à l’heure. Ah ! traître, s’il faut que tu me déshonores, je te renonce pour mon fils, et tu peux bien pour jamais te résoudre à fuir de ma présence.
Les Fourberies de Scapin par Jean Baptiste Poquelin: Molière
Une pièce de théâtre de Molière