les montagnes : le rivage en retentit ; la mer tonne sourdement
le nom de l’éternel, et l’hymne reconnaissant de la nature peut à
peine monter jusqu’à lui.
Et sans cesse elle chante celui qui l’a créée, et du ciel à la
terre, partout sa voix résonne : parmi l’obscurité des nuages le
compagnon de l’éclair glorifie le Seigneur sur la cime des arbres
et sur la crête des montagnes.
Son nom est célébré par le bocage qui frémit, et par le ruis-
seau qui murmure, les vents l’emportent jusqu’à l’arc céleste,
l’arc de grâce et de consolation que sa main tendit dans les nua-
ges.
Et tu te tairas, toi que Dieu créa immortel ! et tu resterais
muet dans ce concert de louanges et d’admiration ! Rends grâ-
ces au Dieu qui te fait partager son éternité !… quels que soient
tes efforts, ils seront toujours indignes de lui.
Cependant chante encore, et glorifie ton bienfaiteur.
Chœur éclatant qui m’entourez, je viens et je m’unis à vous, je
veux partager votre ravissement et vos concerts !
Celui qui créa l’univers, qui créa là haut le flambeau d’or
qui nous éclaire, ici la poudre où s’agitent des millions de vers,
quel est-il ? C’est Dieu ! c’est Dieu ! notre père ! nous l’appelons
ainsi, et d’innombrables voix s’unissent à la nôtre.
Oui, il créa les mondes ; et là bas, le lion, qui verse de son
sein des torrents de lumière : bélier, capricorne, pléiades, scor-
pion, cancer, vous êtes son ouvrage ; voyez la balance s’élever et
descendre… le sagittaire vise… un éclair part.
Il se tourne ; comme ses flèches et son carquois résonnent !
et vous gémeaux, de quelle pure lumière vous êtes enflammés,
vos pieds rayonnants se lèvent pour une marche triomphante.
Le poisson joue et vomit des feux éclatants.
La rose jette un rayon de feu du centre de sa couronne ;
l’aigle au regard flamboyant plane au milieu de ses compagnons
soumis ; le cigne 2 nage, orgueilleux, le col arrondi et les au vent.
Qui t’a donné cette mélodie, ô lyre qui donc a tendu tes
cordes dorées et sonores ? Tu te fais entendre, et les planètes
s’arrêtent dans leur danse circulaire, viennent en roulant sur
leurs orbites la continuer autour de toi.
Voici la vierge ailée en robe de fête, les mains pleines d’épis
et de pampres joyeux. Voici le verseau d’où se précipitent des
flots de lumière ; mais Orion contemple la ceinture et non le
verseau.
Ô si la main de Dieu te répandait sur l’autel, vase céleste !
toute la création volerait en éclats, le cœur du lion se briserait
auprès de l’urne desséchée, la lyre ne rendrait plus que des ac-
cents de mort, et la couronne tomberait flétrie.
Dieu a créé des signes dans les cieux : il fit la lune plus près
de notre poussière. Paisible compagne de la nuit, son doux éclat
répand sur nous la sérénité ; elle revient veiller toujours sur le
front de ceux qui sommeillent.
Je glorifie le Seigneur, celui qui ordonna à la nuit sainte du
sommeil et de la mort d’avoir des voiles et des flambeaux. Terre,
tombeau toujours ouvert pour nous, comme Dieu t’a parée de
fleurs !
Lorsque Dieu se lèvera pour juger, il remuera le tombeau
plein d’ossements, et la terre pleine de semences ! Que tout ce
qui dort se réveille ! La foudre environne le trône de Dieu ;
l’heure du jugement sonne, et la mort a trouvé des oreilles pour
l’entendre.
Un poème de Friedrich Gottlieb Klopstock