Quitte en sournois la route blanche
Où passent trop de curieux,
Et disparait entre les branches.
Celui qui traça son parcours
Fut, je crois bien, un solitaire
Qui pour écrire ses amours,
Choisit comme papier la terre.
Sitôt à l’abri des regards
Il devient un chemin tout rose
Coupant la bruyère au hasard.
– Première joie en l’âme éclose.
Puis il saute un ruisseau : miroir
Où l’on se rencontre avec Elle :
Dans un sourire on laisse voir
L’inclination mutuelle.
Lestement il grimpe un coteau
Dont les framboises et la menthe,
Le petit thé, le pain d’oiseau
Disent une époque attrayante.
En faisant un détour brusqué
Il montre un pic nu, détestable,
Qui semble un bandit embusqué.
– Cette querelle inévitable !
Voici qu’au bord de la forêt
Il marque à peine l’herbe rase,
Se glisse presque droit, discret.
– L’accord se rétablit. On jase.
Des buissons transparents, soudain,
Il émerge et court à la grève,
D’un lac aux horizons lointains
Où vogue, épanoui, le rêve.
Le sentier où je fus souvent
A tant d’attraits pour ceux qu’il guide,
Que nul ne s’en écarte avant
De se trouver, au lac sans rides,
Face à l’amour vaste et limpide.
Alphonse Beauregard