Cet avril animé, ce firmament volage,
Étale avec orgueil en son riche plumage
Et les fleurs du printemps, et les astres des cieux.
Mais comme il fait le vain sous cet arc gracieux
Qui nous forme d’Iris une nouvelle image,
Il rabat tout à coup sa plume et son courage
Sitôt que sur ses pieds il a porté les yeux.Homme, à qui tes désirs font sans cesse la guerre
Et qui veux posséder tout le rond de la Terre :
Vois le peu qu’il en faut pour faire un monument.
Tu n’es rien que l’idole agréable et fragile
Qu’un roi de Babylone avait vue en dormant,
Ta tête est toute d’or, mais tes pieds sont d’argile.
Inhumaine beauté dont l’humeur insolente
En méprisant mes voeux se rit de ma langueur,
Je veux convaincre ici ton ingrate rigueur
Par les vifs arguments d’une raison sanglante.
Ces vers sont de ma flamme une preuve évidente,
Et tous ces traits de pourpre en font voir la grandeur,
Cruelle, touche-les pour en sentir l’ardeur,
Cette écriture fume, elle est encore ardente.
Vois nager dans le sang mes esprits désolés :
Pour apaiser ta haine ils se sont immolés
D’une dévotion qui n’eut jamais d’exemple.
Et si près de mon coeur il en est demeuré,
C’est afin seulement de conserver le temple
Où ton divin portrait est toujours adoré.
Les Amours de Tristan
François Tristan L’Hermite