Et fouette les hivers,
A l’Air, le dieu léger qui rend les fleurs fécondes
Et sonores les vers,
Salut ! C’est le grand dieu dont la robe flottante
Fait le ciel animé ;
Et c’est le dieu furtif qui murmure à l’amante :
“Voici le bien-aimé.”
C’est lui qui fait courir le long des oriflammes
Les frissons belliqueux,
Et qui fait voltiger sur le cou blanc des femmes
Le ruban des cheveux.
C’est par lui que les eaux vont par lourdes nuées
Rafraîchir les moissons,
Qu’aux lèvres des rêveurs s’élèvent remuées
Les senteurs des buissons.
Il berce également l’herbe sur les collines,
Les flottes sur les mers ;
C’est le breuvage épars des feuilles aux poitrines,
L’esprit de l’univers.
Il va, toujours présent dans son immense empire
En tous lieux à la fois,
Renouveler la vie à tout ce qui respire,
Hommes, bêtes et bois ;
Et dans le froid concert des forces éternelles
Seul il chante joyeux,
Errant comme les coeurs, libre comme les ailes,
Et beau comme les yeux !
Stances et poèmes
René-François Sully Prudhomme