J'ai perdu mon pari Mes poches sont vides Il ne me reste plus Que des images morbides
Je sais par coeur Les points communs Entre les semelles usées Les manteaux élimés Les besaces vidées De leur substance intime
Les tartanes bientôt Vont retrouver le port Chargées de lumières Et de couleurs nouvelles Sur les quais les passants Les remarquent à peine
La terre tourne à l'envers Mais personne n'a rien vu Les hommes ont la folie Tragiquement aveuglante
Ils ont coupé les ailes De la grenouille qui Depuis ne vole plus Et se croit obligée De sauter pour ne pas Perdre la face
La cendre est chaude encore Je la tisonne avec ardeur Il s'en élève une vapeur Rosâtre
Ils ont anesthésié Le ciel à notre insu Ces vauriens ne nous ont Pas même prévenus
Est-il au monde regard plus clair Que celui de Françoise L'accorte Fribourgeoise Que l'on voyait naguère Au coeur du Bois d'Amour
Comme la peau se détache de la chair La chair aussi se détache des os Mais les os De quoi se détacheraient-ils