Tandis que je parle Aux rochers de la plage Du sang versé par les soldats Des corps perdus
J’ai vu le côté sombre des vagues Entre les crêtes d’écume Comme des masques dérisoires Dont les dieux les avaient affublées Pour adoucir leurs traits sauvages Ce n’était qu’un banal maquillage
Poète méfie-toi Le temps vire à l’orage Le ciel se remplit De bruits incertains Ta plume frissonne Déjà dans ta main Méfie-toi poète Méfie-toi
Il ne reste dans le fond De l’automne mourant Que des feuilles qui tremblent De peur et de froid Et le mugissement des champs
Comme une fleur flétrie Une orange pourrie Qui monte et descend Sans fin l’escalier Mais feint parfois
Pourquoi reste-t-il Dans le foin des aiguilles Pourquoi se risquer A les y chercher
Dans la forêt des habitudes Une ombre bleue vient se glisser Puis s’accroche aux branches Tordues et désolées D’un sapin ténébreux
Dans l’immense ville rectangulaire Dont les rues sont tracées au cordeau Les roses ce matin Ont été arrachées Et les parterres Soudain endeuillés Gémissent
Voilà des rideaux d’arbres Fraîchement élagués Puissamment éclairés Qui tranchent la sombre Épaisseur du ciel Au creux de la nuit
La chambre est devenue silenceLa chaise est videMais chaude encore de la présence