La nuit était fort noire et la forêt très-sombre. Hermann à mes côtés me paraissait une ombre. Nos chevaux galopaient. A la garde de Dieu ! Les nuages du ciel ressemblaient à des marbres. Les étoiles volaient dans les branches des arbres Comme un essaim d'oiseaux de feu.
Marchands de grec ! marchands de latin ! cuistres ! dogues! Philistins ! magisters ! je vous hais, pédagogues ! Car, dans votre aplomb grave, infaillible, hébété, Vous niez l'idéal, la grâce et la beauté ! Car vos textes, vos lois, vos règles sont fossiles ! Car, avec l'air profond, vous êtes imbéciles !
Ô vous l'âme profonde ! ô vous la sainte lyre ! Vous souvient-il des temps d'extase et de délire, Et des jeux triomphants, Et du soir qui tombait des collines prochaines ? Vous souvient-il des jours ? Vous souvient-il des chênes Et des petits enfants ?
Jadis je vous disais : — Vivez, régnez, Madame ! Le salon vous attend ! le succès vous réclame ! Le bal éblouissant pâlit quand vous partez ! Soyez illustre et belle ! aimez ! riez ! chantez ! Vous avez la splendeur des astres et des roses !
O mon enfant, tu vois, je me soumets. Fais comme moi : vis du monde éloignée ; Heureuse ? non ; triomphante ? jamais. — Résignée ! —
Nous sommes frères : la fleur Par deux arts peut être faite. Le poète est ciseleur ; Le ciseleur est poëte.
Oh! vous aurez trop dit au pauvre petit ange Qu'il est d'autres anges là-haut, Que rien ne souffre au ciel, que jamais rien n'y change, Qu'il est doux d'y rentrer bientôt;
Les étoiles, points d'or, percent les branches noires ; Le flot huileux et lourd décompose ses moires Sur l'océan blêmi ; Les nuages ont l'air d'oiseaux prenant la fuite ; Par moments le vent parle, et dit des mots sans suite, Comme un homme endormi.
Voici juin. Le moineau raille Dans les champs les amoureux ; Le rossignol de muraille Chante dans son nid pierreux.
Tu me parles du fond d'un rêve Comme une âme parle aux vivants. Comme l'écume de la grève, Ta robe flotte dans les vents.