Cléonice

L’ambition, l’avarice, l’amour, la haine tiennent comme un forçat son esprit à la chaîne.

 

Cléonice

Philippe Desportes

Vous n’aimez rien que vous, de vous-même maîtresse,
Toute perfection en vous seule admirant,
En vous votre désir commence et va mourant,
Et l’amour seulement pour vous-même vous blesse.

Franche et libre de soin, votre belle jeunesse
D’un oeil cruel et beau mainte flamme tirant,
Brûle cent mille esprits qui votre aide implorant
N’éprouvent que fierté, mépris, haine et rudesse.

De n’aimer que vous-même est en votre pouvoir,
Mais il n’est pas en vous de m’empêcher d’avoir

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Un ivoire vivant, une neige animée,
Fait que mon oeil ravi ne s’en peut retirer.
Ô main victorieuse, apprise à bien tirer,
Que tu m’as de beaux traits la poitrine entamée !

Aux célestes beautés mon âme accoutumée
Ne trouve objet que toi qui la puisse attirer,
Et croit qu’elle te peut sans offense adorer,
Tant elle est de ta glace à toute heure enflammée.

Le jour dont si souvent j’aime à me souvenir,
Jour qu’il te plut mes yeux et mon coeur retenir,

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Si la vierge Erigone, Andromède, et Cythère,
Astres pleins d’amitié, bénins et gracieux,
Font le ciel plus aimable, et l’embellissent mieux
Que le noir Scorpion, l’Hydre et le Sagittaire,

Pourquoi ne changez-vous ce courage adversaire ?
Pourquoi ne sont plus doux vos propos et vos yeux ?
Pourquoi vous adorant m’êtes-vous si contraire ?
Pourquoi me rendez-vous malade et furieux ?

Quand vous m’aurez tué pour vous avoir aimée,
Vous serez par les dieux en astre transformée,

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Si la loi des amours saintement nous assemble,
Avec un seul esprit nous faisant respirer,
L’outrage du malheur se peut-il endurer,
Qui si cruellement nous arrache d’ensemble ?

Je ne vous vois jamais, mon coeur, que je ne tremble,
Appréhendant l’effort qui nous doit séparer :
Et n’ose bien souvent vos regards désirer,
Tant l’éclipse qui suit ténébreuse me semble !

Toutefois quand les corps n’ont moyen de se voir
L’âme pourtant n’est serve, et peut à son vouloir

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Qu’on m’arrache le coeur, qu’on me fasse endurer
Le feu, le fer, la roue, et tout autre supplice,
Que l’ire des tyrans dessus moi s’assouvisse,
Je pourrai tout souffrir sans gémir ni pleurer.

Mais qu’on veuille en vivant de moi me séparer,
M’ôter ma propre forme, et par tant d’injustice
Vouloir que sans mourir de vous je me bannisse,
On ne saurait, Madame, il ne faut l’espérer.

En dépit des jaloux, partout je vous veux suivre ;
S’ils machinent ma mort, je suis si las de vivre,

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Nuict, mere des soucis, cruelle aux affligez,
Qui fait que la douleur plus poignante est sentie,
Pource que l’ame alors n’estant point divertie,
Se donne toute en proie aux pensers enragez.

Autre-fois mes travaux tu rendois soulagez,
Et ma jeune fureur sous ton ombre amortie ;
Mais, hélas ! ta faveur s’est de moy departie,
Je sens tous tes pavots en espines changez.

Je ne sçay plus que c’est du repos que tu donnes ;
La douleur et l’ennuy de cent pointes felonnes

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Misérables travaux, vagabonde pensée,
Soucis continuels, espoirs faux et soudains,
Feintes affections, véritables dédains,
Mémoire qu’une absence a bientôt effacée,

Vraie et parfaite amour d’oubli récompensée,
Aventureux désirs, mais follement hautains,
Et vous de ma douleur messagers trop certains,
Soupirs, qui donnez air à mon âme oppressée,

Quoi ? ces vivantes morts, ces durables ennuis,
Ces jours noirs et troublés, ces languissantes nuits

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Le tens leger s’enfuit sans m’en apercevoir,
Quand celle à qui je suis mes angoisses console :
Il n’est vieil, n’y boiteux, c’est un enfant qui vole,
Au moins quand quelque bien vient mon mal deçevoir.

À peine ai-je loisir seulement de la voir
Et de ravir mon ame en sa douce parole,
Que la nuict à grands pas se haste et me la volle,
M’ostant toute clarte, toute ame et tout pouvoir.

Bien-heureux quatre jours, mais quatre heures soudaines ?
Que n’avez-vous duré pour le bien de mes paines ?

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J’ai dit à mon désir : pense à te bien guider,
Rien trop bas, ou trop haut, ne te fasse distraire.
Il ne m’écouta point, mais jeune et volontaire,
Par un nouveau sentier se voulut hasarder.

Je vis le ciel sur lui mille orages darder,
Je le vis traversé de flamme ardente et claire,
Se plaindre en trébuchant de son vol téméraire,
Que mon sage conseil n’avait su retarder.

Après ton précipice, ô désir misérable !
Je t’ai fait dedans l’onde une tombe honorable

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