Par tant et tant de maux au jeu de la fortune,
Je suivais d’Apollon la trace non commune,
D’une sainte fureur saintement agité.
Ores ne sentant plus cette divinité,
Mais piqué du souci qui fâcheux m’importune,
Une adresse j’ai pris beaucoup plus opportune
A qui se sent forcé de la nécessité.
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Avecques l’Ascréan dessus la double cime:
Et pour être de ceux dont on fait plus d’estime,
Dedans l’onde au cheval tout nu s’ira plonger.
Quant à moi, je ne veux, pour un vers allonger,
M’accourcir le cerveau: ni pour polir ma rime,
Me consumer l’esprit d’une soigneuse lime,
Frapper dessus ma table ou mes ongles ronger.
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Je ne veux point chercher l’esprit de l’univers,
Je ne veux point sonder les abîmes couverts,
Ni dessiner du ciel la belle architecture.
Je ne peins mes tableaux de si riche peinture,
Et si hauts arguments ne recherche à mes vers:
Mais suivant de ce lieu les accidents divers,
Soit de bien, soit de mal, j’écris à l’aventure.
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Hic fellisque simul, simulque mellis,
Permixtumque salis refert saporem.
Si gratum quid erit tuo palato,
Huc conviva veni: tibi haec parata est
Coena. Sin minus, hinc facesse, quaeso :
Ad hanc te volui haud vocare coenam.
Qui l’aveugle appétit de la jeunesse imite,
Et jà foid par les ans de soi-même s’incite
A vivre délicat en repos otieux.
Mais je ne crains rien tant qu’un jeune ambitieux
Qui pour se faire grand contrefait de l’hermite,
Et voilant sa traïson d’un masque d’hypocrite,
Couve sous beau semblant un coeur malicieux.
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Et si mes vers se trouvent imparfaits,
Le lieu, le temps, l’âge où je les ai faits,
Et mes ennuis leur serviront d’excuse.
J’étais à Rome au milieu de la guerre,
Sortant déjà de l’âge plus dispos,
A mes travaux cherchant quelque repos,
Non pour louange ou pour faveur acquerre.
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Une langue exprimer, autant que la nature
Par l’art se peut montrer, et que par la peinture
On peut tirer au vif un naturel visage :
Autant exprimes-tu, et encor davantage,
Avecques le pinceau de ta docte écriture,
La grâce, la façon, le port et la stature
De celui qui d’Énée a décrit le voyage.
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Tu t’en iras sans moi voir la Cour de mon Prince.
Hé, chétif que je suis, combien en gré je prinsse
Qu’un heur pareil au tien fût permis à mes yeux ?
Là si quelqu’un vers toi se montre gracieux,
Souhaite-lui qu’il vive heureux en sa province :
Mais si quelque malin obliquement te pince,
Souhaite-lui tes pleurs et mon mal ennuyeux.
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Et malheureuse soit la flatteuse espérance,
Quand pour venir ici j’abandonnai la France:
La France, et mon Anjou, dont le désir me point.
Vraiment d’un bon oiseau guidé je ne fus point,
Et mon coeur me donnait assez signifiance
Que le ciel était plein de mauvaise influence,
Et que Mars était lors à Saturne conjoint.
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Jamais ne lira-t-on que cette Idalienne?
Ne verra-t-on jamais Mars sans la Cyprienne?
Jamais ne verra-t-on que Ronsard amoureux?
Retistra-t-on toujours, d’un tour laborieux,
Cette toile, argument d’une si longue peine?
Reverra-t-on toujours Oreste sur la scène?
Sera toujours Roland par amour furieux?
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