Le clair jardin c'est la santé. Il la prodigue, en sa clarté, Au va-et-vient de ses milliers de mains, De palmes et de feuilles,
L'ombre est lustrale et l'aurore irisée. De la branche, d'où s'envole là-haut L'oiseau, Tombent des gouttes de rosée.
L'immobile beauté Des soirs d'été, Sur les gazons où ils s'éploient, Nous offre le symbole Sans geste vain, ni sans parole, Du repos dans la joie.
L'aube, l'ombre, le soir, l'espace et les étoiles ; Ce que la nuit recèle ou montre entre ses voiles, Se mêle à la ferveur de notre être exalté. Ceux qui vivent d'amour vivent d'éternité.
L'âge est venu, pas à pas, jour à jour, Poser ses mains sur le front nu de notre amour Et, de ses yeux moins vifs, l'a regardé.
Je t'apporte, ce soir, comme offrande, ma joie D'avoir plongé mon corps dans l'or et dans la soie Du vent joyeux et franc et du soleil superbe ; Mes pieds sont clairs d'avoir marché parmi les herbes, Mes mains douces d'avoir touché le coeur des fleurs,
Je suis sorti des bosquets du sommeil, Morose un peu de t'avoir délaissée Sous leurs branches et leurs ombres tressées, Loin du joyeux et matinal soleil.
J'ai cru à tout jamais notre joie engourdie Comme un soleil fané avant qu'il ne fût nuit, Le jour qu'avec ses bras de plomb, la maladie M'a lourdement traîné vers son fauteuil d'ennui.
Et te donner ne suffit plus, tu te prodigues : L'élan qui t'emporte à nous aimer plus fort, toujours, Bondit et rebondit, sans cesse et sans fatigue, Toujours plus haut vers le grand ciel du plein amour.
Dans la maison où notre amour a voulu naître, Avec les meubles chers peuplant l'ombre et les coins, Où nous vivons à deux, ayant pour seuls témoins Les roses qui nous regardent par les fenêtres.