Dom Juan ou le Festin de pierre
DOM JUAN, SGANARELLE.
DOM JUAN: Holà, hé, Sganarelle !
SGANARELLE: Plaît-il ?
DOM JUAN: Comment ? coquin, tu fuis quand on m’attaque ?
SGANARELLE: Pardonnez-moi, Monsieur; je viens seulement d’ici près. Je crois que cet habit est purgatif, et que c’est prendre médecine que de le porter.
DOM JUAN: Peste soit l’insolent ! Couvre au moins ta poltronnerie d’un voile plus honnête. Sais-tu bien qui est celui à qui j’ai sauvé la vie ?
SGANARELLE: Moi ? Non.
DOM JUAN: C’est un frère d’Elvire.
SGANARELLE: Un.
DOM JUAN: Il est assez honnête homme, il en a bien usé, et j’ai regret d’avoir démêlé avec lui.
Le Bourgeois gentilhomme par Molière
Cléonte, Covielle.
Covielle
Vous avez fait de belles affaires avec vos beaux sentiments.
Cléonte
Que veux-tu ? j’ai un scrupule là-dessus, que l’exemple ne saurait vaincre.
Covielle
Vous moquez-vous, de le prendre sérieusement avec un homme comme cela ? Ne voyez-vous pas qu’il est fou ? et vous coûtait-il quelque chose de vous accommoder à ses chimères ?
Cléonte
Tu as raison; mais je ne croyais pas qu’il fallût faire ses preuves de noblesse pour être gendre de Monsieur Jourdain.
Argan, Angélique, Toinette
Argan se met dans sa chaise.
Oh çà, ma fille, je vais vous dire une nouvelle, où peut-être ne vous attendez-vous pas. On vous demande en mariage. Qu’est-ce que cela ? Vous riez ? Cela est plaisant oui, ce mot de mariage ! Il n’y a rien de plus drôle pour les jeunes filles. Ah ! nature, nature ! A ce que je puis voir, ma fille, je n’ai que faire de vous demander si vous voulez bien vous marier.
Angélique
Je dois faire, mon père, tout ce qu’il vous plaira de m’ordonner.
Argan
Je suis bien aise d’avoir une fille si obéissante: la chose est donc conclue, et je vous ai promise.
DOM JUAN, SGANARELLE.
DOM JUAN: Quoi qu’il en soit, laissons cela: c’est une bagatelle, et nous pouvons avoir été trompés par un faux jour, ou surpris de quelque vapeur qui nous ait troublé la vue.
SGANARELLE: Eh ! Monsieur, ne cherchez point à démentir ce que nous avons vu des yeux que voilà. Il n’est rien de plus véritable que ce signe de tête; et je ne doute point que le Ciel, scandalisé de votre vie, n’ait produit ce miracle pour vous convaincre, et pour vous retirer de.
DOM JUAN: Écoute. Si tu m’importunes davantage de tes sottes moralités, si tu me dis encore le moindre mot là-dessus, je vais appeler quelqu’un, demander un nerf de bœuf, te faire tenir par trois ou quatre, et te rouer de mille coups. M’entends-tu bien ?
Le Bourgeois gentilhomme par Molière
Monsieur Jourdain, Laquais.
Monsieur Jourdain
Que diable est-ce là ! ils n’ont rien que les grands seigneurs à me reprocher; et moi, je ne vois rien de si beau que de hanter les grands seigneurs: il n’y a qu’honneur et que civilité avec eux, et je voudrais qu’il m’eût coûté deux doigts de la main, et être né comte ou marquis.
Laquais
Monsieur, voici Monsieur le Comte, et une dame qu’il mène par la main.
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Le Bourgeois gentilhomme par Molière
Dorimène, Dorante, Laquais.
Laquais
Monsieur dit comme cela qu’il va venir ici tout à l’heure.
Dorante
Voilà qui est bien.
Dorimène
Je ne sais pas, Dorante, je fais encore ici une étrange démarche, de me laisser amener par vous dans une maison où je ne connais personne.
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Béline, Angélique, Toinette, Argan
Argan
Ah ! ma femme, approchez.
Béline
Qu’avez-vous, mon pauvre mari ?
Argan
Venez-vous-en ici à mon secours.
Béline
Qu’est-ce que c’est donc qu’il y a, mon petit fils ?
Argan
Ma mie !
DOM JUAN, LA VIOLETTE, SGANARELLE.
LA VIOLETTE: Monsieur, voilà votre marchand, M. Dimanche, qui demande à vous parler.
SGANARELLE: Bon, voilà ce qu’il nous faut, qu’un compliment de créancier ! De quoi s’avise-t-il de nous venir demander de l’argent, et que ne lui disais-tu que Monsieur n’y est pas ?
LA VIOLETTE: Il y a trois quarts d’heure que je lui dis; mais il ne veut pas le croire, et s’est assis là-dedans pour attendre.
SGANARELLE: Qu’il attende, tant qu’il voudra.
DOM JUAN: Non, au contraire, faites-le entrer. C’est une fort mauvaise politique que de se faire celer aux créanciers. Il est bon de les payer de quelque chose, et j’ai le secret de les renvoyer satisfaits sans leur donner un double.
ACTE IV, Scène II
Dom Juan ou le Festin de pierre écrit par Molière sous la protection de Louis XIV
La pièce de Théâtre Dom Juan ou le Festin de pierre par Molière
Le Notaire, Béline, Argan
Argan
Approchez, monsieur de Bonnefoi, approchez. Prenez un siège, s’il vous plaît. Ma femme m’a dit, monsieur, que vous étiez fort honnête homme, et tout à fait de ses amis; et je l’ai chargée de vous parler pour un testament que je veux faire.
Béline
Hélas ! je ne suis point capable de parler de ces choses-là.
Le Notaire
Elle m’a, monsieur, expliqué vos intentions, et le dessein où vous êtes pour elle; et j’ai à vous dire là-dessus que vous ne sauriez rien donner à votre femme par votre testament.
DOM JUAN, M. DIMANCHE, SGANARELLE, Suite.
DOM JUAN, FAISANT DE GRANDES CIVILITES: Ah ! Monsieur Dimanche, approchez. Que je suis ravi de vous voir, et que je veux de mal à mes gens de ne vous pas faire entrer d’abord ! J’avais donné ordre qu’on ne me fît parler personne; mais cet ordre n’est pas pour vous, et vous êtes en droit de ne trouver jamais de porte fermée chez moi.
M. DIMANCHE: Monsieur, je vous suis fort obligé.
DOM JUAN, parlant à ses laquais: Parbleu ! coquins, je vous apprendrai à laisser M. Dimanche dans une antichambre, et je vous ferai connaître les gens.
M. DIMANCHE: Monsieur, cela n’est rien.
DOM JUAN: Comment ? vous dire que je n’y suis pas, à M. Dimanche, au meilleur de mes amis ?