Articles by fandeculture


Tolocototignan

C’était un soir, vers neuf heures, au théâtre Montparnasse. Le petit Chose qui jouait dans la première pièce venait de finir et remontait dans sa loge. En montant, il se croisa avec Irma Borel qui allait entrer scène. Elle était rayonnante, toute en velours et en guipure, l’éventail au poing comme Célimène.

” Viens dans la salle, lui dit-elle en passant, je suis en train… je serai très belle. ”

Il hâta le pas vers sa loge et se déshabilla bien vite. Cette loge, qu’il partageait avec deux camarades, était un cabinet sans fenêtre, bas de plafond, éclairé au schiste. Deux ou trois chaises de paille formaient l’ameublement. Le long du mur pendaient des fragments de glace, des perruques défrisées, des guenilles à paillettes, velours fanés, dorures éteintes; à terre, dans un coin, des pots de rouge sans couvercle, des houppes à poudre de riz toutes déplumées.
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L’enlèvement

— Regarde donc, Daniel, me dit ma mère Jacques quand nous entrâmes dans la chambre de l’hôtel Pilois: c’est comme la nuit de ton arrivée à Paris !

Comme cette nuit-là, en effet, un joli réveillon nous attendait sur une nappe bien blanche; le pâté sentait bon, le vin avait l’air vénérable, la flamme claire des bougies riait au fond des verres… Et pourtant, et pourtant, ce n’était plus la même chose ! Il y a des bonheurs qu’on ne recommence pas. Le réveillon était le même; mais il y manquait la fleur de nos anciens convives, les belles ardeurs de l’arrivée, les projets de travail, les rêves de gloire, et cette sainte confiance qui fait rire et qui donne faim. Pas un, hélas ! pas un ces réveillonneurs du temps passé n’avait voulu venir chez M. Pilois. Ils étaient tous restés dans le clocher de Saint-Germain; même, au dernier moment, l’Expansion, qui nous avait promis d’être de la fête, fit dire qu’elle ne viendrait pas.

Oh ! non, ce n’était plus la même chose. Je le compris si bien qu’au lieu de m’égayer, l’observation de Jacques me fit monter aux yeux un grand flot de larmes. Je suis sûr qu’au fond du cœur il avait bonne envie de pleurer, lui aussi; mais il eut le courage de se contenir, et me dit en prenant un petit air allègre: ” Voyons ! Daniel, assez pleuré ! Tu ne fais que cela depuis une heure. (Dans la voiture, pendant qu’il me parlait, je n’avais cessé de sangloter sur son épaule.) En voilà un drôle d’accueil ! Tu me rappelles positivement les plus mauvais jours de mon histoire, le temps des pots de colle et de: ” Jacques tu es un âne ! ” Voyons, séchez vos larmes, jeune repenti, et regardez-vous dans la glace, cela vous fera rire. ”
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Chacun porte en son cœur un écho de son bonheur. Charles Trenet paroles de La maison du poète 1956. Une citation de Charles Trenet

Chacun porte en son cœur un écho de son bonheur. Charles Trenet paroles de La maison du poète 1956. CITATIONS CHARLES TRENET - Citation travail
Plus un humoriste est intelligent, moins il a besoin de déformer la réalité pour la rendre significative. Journal 1889-1939. André Gide

Plus un humoriste est intelligent, moins il a besoin de déformer la réalité pour la rendre significative. Journal 1889-1939. André Gide CITATIONS ANDRÉ GIDE - Citations André Gide

L’arlésienne

Pour aller au village, en descendant de mon moulin, on passe devant un mas bâti près de la route au fond d’une grande cour plantée de micocouliers. C’est la vraie maison du ménager de Provence, avec ses tuiles rouges, sa large façade brune irrégulièrement percée, puis tout en haut la girouette du grenier, la poulie pour hisser les meules, et quelques touffes de foin brun qui dépassent…

Pourquoi cette maison m’avait-elle frappé ? Pourquoi ce portail fermé me serrait-il le cœur ? Je n’aurais pas pu le dire, et pourtant ce logis me faisait froid. Il y avait trop de silence autour… Quand on passait, les chiens n’aboyaient pas, les pintades s’enfuyaient sans crier… A l’intérieur, pas une voix ! Rien, pas même un grelot de mule… Sans les rideaux blancs des fenêtres et la fumée qui montait des toits, on aurait cru l’endroit inhabité.

Hier, sur le coup de midi, je revenais du village, et, pour éviter le soleil, je longeais les murs de la ferme, dans l’ombre des micocouliers… Sur la route, devant le mas, des valets silencieux achevaient de charger une charrette de foin… Le portail était resté ouvert. Je jetai un regard en passant, et je vis, au fond de la cour, accoudé, — la tête dans ses mains, — sur une large table de pierre, un grand vieux tout blanc, avec une veste trop courte et des culottes en lambeaux… Je m’arrêtai. Un des hommes me dit tout bas:

— Chut ! c’est le maître… Il est comme ça depuis le malheur de son fils.

A ce moment une femme et un petit garçon, vêtus de noir, passèrent près de nous avec de gros paroissiens dorés, et entrèrent à la ferme.
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