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Je n'ai pas besoin d'écouter pour entendre. Même avant d'entendre les voix, je connais déjà les pensées. Oedipe, André Gide Une citation sur le besoin  

Je n ai pas besoin d écouter pour entendre. Même avant d entendre les voix, je connais déjà les pensées. Oedipe, André Gide CITATIONS ANDRÉ GIDE - Citations André Gide - Citation besoin

Le pion

Je pris donc possession de l’étude des moyens…

Je trouvai là une cinquantaine de méchants drôles, montagnards joufflus de douze à quatorze ans, fils de métayers enrichis, que leurs parents envoyaient au collège pour en faire de petits bourgeois, à raison de cent vingt francs par trimestre.

Grossiers, insolents, orgueilleux, parlant entre eux un rude patois cévenol auquel je n’entendais rien, ils avaient presque tous cette laideur spéciale à l’enfance qui mue, de grosses mains rouges avec des engelures, des voix de jeunes coq enrhumés, le regard abruti, et par là-dessus l’odeur du collège… Ils me haïrent tout de suite, sans me connaître. J’étais pour eux l’ennemi, le Pion; et du jour où je m’assis dans ma chaire, ce fut la guerre entre nous, une guerre acharnée, sans trêve, de tous les instants.

Ah ! les cruels enfants, comme ils me firent souffrir !…
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Les yeux noirs

Maintenant le collège est désert. Tout le monde est parti… D’un bout des dortoirs à l’autre, des escadrons de gros rats font des charges de cavalerie en plein jour. Les écritoires se dessèchent au fond des pupitres. Sur les arbres des cours, la division des moineaux est en fête; ces messieurs ont invité tous leurs camarades de la ville, ceux de l’évêché, ceux de la sous-préfecture, et, du matin jusqu’au soir, c’est un pépiage assourdissant.

De sa chambre, sous les combles, le petit Chose les écoute en travaillant. On l’a gardé par charité, dans la maison, pendant les vacances. Il en profite pour étudier à mort les philosophes grecs. Seulement, la chambre est trop chaude et les plafonds trop bas. On étouffe là-dessous… Pas de volets aux fenêtres. Le soleil entre comme une torche et met le feu partout. Le plâtre des solives craque, se détache… De grosses mouches, alourdies par la chaleur, dorment collées aux vitres… Le petit Chose, lui, fait de grands efforts pour ne pas dormir. Sa tête est lourde comme du plomb; ses paupières battent.

Travaille donc, Daniel Eyssette !… Il faut reconstruire le foyer… Mais non ! il ne peut pas… Les lettres de son livre dansent devant ses yeux, puis, ce livre qui tourne, puis la table, puis la chambre. Pour chasser cet étrange assoupissement, le petit Chose se lève, fait quelques pas; arrivé devant la porte, il chancelle et tombe à terre comme une masse, foudroyé par le sommeil.
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