Jusqu’à l’heure où de ce séjour
Les fleurs fermeront leur calice
Aux regards languissants du jour.
Voilà ton ciel, ô mon étoile !
Soulève, oh ! soulève ce voile,
Éclaire la nuit de ces lieux ;
Parle, chante, rêve, soupire,
Pourvu que mon regard attire
Un regard errant de tes yeux.
Laisse-moi parsemer de roses
La tendre mousse où tu t’assieds,
Et près du lit où tu reposes
Laisse-moi m’asseoir à tes pieds.
Heureux le gazon que tu foules,
Et le bouton dont tu déroules
Sous tes doigts les fraîches couleurs !
Heureuses ces coupes vermeilles
Que pressent tes lèvres, pareilles
Aux frelons qui tètent les fleurs !
Si l’onde des lis que tu cueilles
Roule les calices flétris,
Des tiges que ta bouche effeuille
Si le vent m’apporte un débris,
Si ta bouche qui se dénoue
Vient, en ondulant sur ma joue,
De ma lèvre effleurer le bord ;
Si ton souffle léger résonne,
Je sens sur mon front qui frissonne
Passer les ailes de la mort.
Souviens-toi de l’heure bénie
Où les dieux, d’une tendre main,
Te répandirent sur ma vie
Comme l’ombre sur le chemin.
Depuis cette heure fortunée,
Ma vie à ta vie enchaînée,
Qui s’écoule comme un seul jour,
Est une coupe toujours pleine,
Où mes lèvres à longue haleine
Puisent l’innocence et l’amour.
Ah ! lorsque mon front qui s’incline
Chargé d’une douce langueur,
S’endort bercé sur ta poitrine
Par le mouvement de ton coeur…
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Nouvelles méditations poétiques
Alphonse de Lamartine