Ils s’en venaient par les routes roses,
Chantant et lançant en l’air des balles
Qu’ils rattrapaient, experts à ces choses,
Dans des coupes. Ils allaient aux fêtes
Où l’on couronne les fous de roses.
Et par la bride ils menaient des bêtes
Aux housses de pourpre, avec des plumes
Enormes qui tremblaient sur leurs tètes.
Puis dans l’azur matinal des brumes
Filèrent des chars d’or où les belles
Sonnaient les grelots de leurs costumes.
Dans la venelle, des ribambelles
D’enfants dansaient devant la parade.
A leurs poings tremblaient des colombelles.
Or quand eut passé la mascarade,
Je rêvai d’aller mimer l’amour
Comme eux, sur les tréteaux et l’estrade.
Et depuis les chansons de ce jour
Mon âme éprise de toutes feintes
Guette au bord des chemins le retour
De baladins et des femmes peintes.
Petits poèmes d’automne
Stuart Merrill