Sans en chercher la preuve
En tout cet univers, et l'aller parcourant,
Dans les citrouilles je la treuve.
Un villageois, considérant
Combien ce fruit est gros et sa tige menue:
" A quoi songeait, dit-il, l'auteur de tout cela?
Il a bien mal placé cette citrouille-là
Hé parbleu! je l'aurais pendue
A l'un des chênes que voilà;
C'eût été justement l'affaire:
Tel fruit, tel arbre, pour bien faire.
C'est dommage, Garo, que tu n'es point entré
Au conseil de celui que prêche ton curé:
Tout en eût été mieux: car pourquoi, par exemple,
Le gland, qui n'est pas gros comme mon petit doigt,
Ne pend-il pas en cet endroit?
Dieu s'est mépris: plus je contemple
Ces fruits ainsi placés, plus il semble à Garo
Que l'on a fait un quiproquo."
Cette réflexion embarrassant notre homme:
" On ne dort point, dit-il, quand on a tant d'esprit"
Sous un chêne aussitôt il va prendre son somme.
Un gland tombe: le nez du dormeur en pâtit.
Il s'éveille; et portant la main sur son visage,
Il trouve encor le gland pris au poil du menton.
Son nez meurtri le force à changer de langage.
" Oh! oh! dit-il, je saigne! et que serait-ce donc
S'il fût tombé de l'arbre une masse plus lourde,
Et que ce gland eût été gourde?
Dieu ne l'a pas voulu: sans doute il eut raison,
J'en vois bien à présent la cause."
En louant Dieu de toute chose,
Garo retourne à la maison.