Les Poèmes dorés / Poésie Anatole France
L’ombre avec des frissons envahit les platanes ;
De légères vapeurs montent des chemins creux.
Les vieillards sont assis, et les voix alternées
Sous le feuillage obscur se perdent égrenées.
C’est l’heure où l’esprit rêve, heureux ou malheureux.
Le crépuscule expire et les étoiles blanches
Commencent en tremblant à poindre dans les branches.
Au regard exalté qui songe et les poursuit,
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Et ceint des froides fleurs dormant sur les eaux blêmes
En un doux ciel humide effile ses torts bleus.
Dans le parc, où jadis on vit flotter des fées,
Les Nymphes, par le lierre en leur marbre étouffées,
Méditent longuement leurs amours fabuleux.
Déjà des vieux tilleuls les premières rangées
Versent sur les gazons leurs ombres allongées
Jusqu’au pied du fossé qui borde le manoir.
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Traîne ses marnes et ses eaux
Au milieu des pâles roseaux,
Presse en ses bras une longue île,
Qui semble un navire échoué
Par quelque héroïque aventure,
Perdant sa forme et sa nature,
Dormeur à l’oubli dévoué.
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L’instinct primordial de l’antique Nature
Qui mêlait les flancs nus dans le fond des forêts
Trouble l’épouse encor sous sa riche ceinture ;
Et, savante en pudeur, attentive à nos lois,
Elle garde le sang de l’Ève des grands bois.
Les Poèmes dorés
Anatole France
A peine gardons-nous de tes amours défunts,
Femme, ce que la fleur qui sur ton sein se fane
Y laisse d’âme et de parfums.
Ils n’ont, les plus beaux bras, que des chaînes d’argile,
Indolentes autour du col le plus aimé ;
Avant d’être rompu leur doux cercle fragile
Ne s’était pas même fermé.
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Car la reine d’Ecosse, aux lèvres de carmin,
Qui récitait Ronsard et le missel romain,
Y mit en la touchant un peu de sa magie.
La reine blonde, avec sa fragile énergie,
Signa Marie au bas de ce vieux parchemin.
Et le feuillet heureux a tiédi sous la main
Que bleuissait un sang fier et prompt à l’orgie.
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La falaise, la mer et le sable, dans l’anse
Les embarcations se réveillaient déjà.
Du gouffre oriental le soleil émergea
Et couvrit l’Océan d’une nappe embrasée.
La dune au loin sourit, ondoyante et rosée.
On voyait des éclairs aux vitres des maisons.
Au sommet des coteaux les jeunes frondaisons
Commençaient à verdir dans la clarté première.
Et le ciel aspirait largement la lumière.
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De l’esprit éloquent des vignes que Théra,
Se tordant sur les flots, noire, déchevelée,
Étendit au puissant soleil qui les dora.
Théra ne s’orne plus de myrtes ni d’yeuses,
Ni de la verte absinthe agréable aux troupeaux.
Depuis que, remplissant ses veines furieuses,
Le feu plutonien l’agite sans repos.
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Quand le margouilla porte un pantalon, il sait où mettre sa queue. Un Proverbe ivoirien
Vaincue et triomphante et chastement lascive,
Elle disait d’un ton de bien-être : J’ai mal !…
Les roses s’effeuillaient sur sa tête pensive
Où murmurait encor l’âme des violons ;
Son pied avait parfois un spasme mélodique.
Le mouchoir de dentelle au bout de ses doigts longs
Glissait ; et sur les bras du fauteuil héraldique,
Ses bras minces et blancs s’allongeaient mollement,
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