Des soirs vieux, malgré lui, hors du Vrai, sans paphos
Où des déesses, il s’exile ! et, dans les gammes
Des azurs et des ors, et le nu des paros,
Mensonge et dieux il pleure, et Vous, ô pâles Ames !
Vagueuses Vierges, aux plis longs des longs peplos ! ….
…Alors, vieux de mille ans, haut azur sous l’azur,
Vieux rameaux et gaulis ! viviez-vous grands et glauques,
Temples ! et, solennels et larges dans l’air pur,
Adorés de la Vierge, émoi de l’homme mûr,
Alors, viviez-vous seuls, seuls aux zéphirs non rauques !
Lorsque montait vers vous la vierge aux Yeux d’avril,
Sous le lin vierge avait des peurs sa peau sans hâle :
Vous exhaliez, rameaux, un arôme viril,
Tiède : et l’Impolluée au sexe puéril
Avait de longs émois sous le long peplos pâle…
Alors, vous glissiez-vous, déesses aux grands nus !
Glauques et pâles sous la glauqueur des ramées :
A nos heures, de Nous, nous les nouveaux-venus,
Vous avez peur, hélas ! et, vos seins ingénus,
Nul ne les verra plus, ô pâles inhumées !
Or, des déesses quand ainsi le rêve grand,
Voyait-on des Yeux d’or à des ardeurs soudaines
Darder dans les glauqueurs et prendre un long élan
D’animal suivi près : et le sauvage han
Ahanait, d’égipans noirs et noueux de veines !…
Alors, alliez-vous, vierge au peplos onduleux !
Quand vous passiez auprès des verdures rigides,
Pleine d’émoi soudain : quand, magique et nerveux,
Un arome non mis aux pieds des grands Aïeux
Moire vos plis divins d’eaux molles et livides…
Ainsi va-t-il aux Temps des dieux et du Mensonge,
Montant aux Temples où haut s’azure à l’envi
D’horizons, la verdure ! et Vous, pour que s’allonge
Son long songe, sonnez en un rêve suivi,
Ô pipeaux ! un doux rire épars dans le Mensonge
De lèvre mi-surprise et de sein mi-ravi !
Un poème de René Ghil